Depuis toute petite, je sentais tout. Les émotions des autres, leurs blocages, leurs douleurs physiques… tout se déposait en moi comme une éponge.

Je me suis longtemps demandé si quelque chose n’allait pas chez moi, si mon corps était « cassé », ou si j’avais manqué une séance importante avant d’arriver sur Terre. J’avais l’impression de vivre dans un monde qui ne parlait pas ma langue, comme une étrangère parachutée ici par erreur sans traducteur.
 

Alors, pour donner le change, j’ai appris à me suradapter. À gommer mes différences, à étouffer mes besoins, à me fondre dans le décor. Je portais en silence ce trop-plein de sensations, persuadée que c’était normal. Je me disais que tout le monde devait vivre cela. Mais mon corps, lui, n’arrêtait pas de m’envoyer des messages qui m’accablaient encore davantage. Tensions, fatigue, asthme, allergies, maladies à répétition… je sentais bien qu'il y avait en moi une dissonance, mais comment faire quand c'est la seule réalité connue depuis l'enfance? Et comment amorcer un changement dans un monde qui ne semble pas en adéquation avec soi?

 

En 2021, j’ai réalisé de manière brutale que la vie est faite de choix. Et quand on n’ose pas les prendre, elle finit toujours par les prendre pour nous. Pour moi, ce fut le jour où mon corps a crié « stop ». Ce basculement m’a forcée à ralentir, à sentir, à revenir à moi. Non pour faire, mais justement pour être.

 

À partir de là, ma perception du monde a changé. J’ai compris que mon corps n’était pas mon ennemi, mais mon allié le plus fidèle. Qu’il n’était pas là pour me freiner, mais pour me guider, m’ancrer, m’apprendre à écouter. Cette révélation a fait voler en éclat une croyance profondément ancrée : celle qu’il fallait me couper de mes sensations pour survivre. J’ai découvert que j’étais pleinement humaine, que j’avais des besoins, des limites, des désirs et des envies. Et surtout, le droit de respecter ma singularité pour exister telle que je ressens les choses réellement et à ma manière.

 

Peu à peu, ma sensibilité s’est révélée sous un autre jour. Non plus comme une faiblesse, mais comme un don, une porte ouverte sur un regard plus profond et une sagesse que je n’avais pas encore appris à accueillir. En honorant mes besoins et mes limites, en me donnant la permission d’être moi, la lutte intérieure s’est apaisée petit à petit.